Entretien avec l’auteure Noann Lyne

6ème partie de notre série d’entretiens avec des auteurs d’écrits sensuels. Cette semaine, faisons connaissance avec Noann Lyne.

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THÉO KOSMA – On sent dans certains de vos textes érotiques une certaine nostalgie… auriez-vous aimé vivre dans un autre temps… ou bien dans d’autres contrées, voire même d’autres dimensions ? Si oui, qu’auriez-vous désiré y vivre ?

NOANN LYNE – Carrément, mais aucune époque passée ne m’attire, ne fût-ce que pour le confort de vie actuel, dont il serait difficile de se passer. J’aimerais tout refaire, tout revoir, créer une dimension nouvelle faite d’amour, de paix et de bonté. Le plus décevant, c’est que ce monde est possible dès maintenant, mais tout va dans le mauvais sens. L’être humain a le pouvoir de créer une humanité de paix et d’amour, au lieu de quoi il choisit toujours le conflit.

THÉO KOSMA – Vous avez coutume de faire partie de la collection « 20 histoires de… » aux éditions de la Musardine. Écrivez-vous spécialement pour eux, ou bien trouvez-vous toujours un écrit correspondant à la thématique en cours ?

NOANN LYNE – Oui c’est exact. J’ai envoyé un texte il y a deux ans, qui a été accepté. Je ne savais pas dans quoi je mettais le doigt. Il est difficile de sortir de cette addiction qui consiste à écrire les bizarreries que l’on a au fond de soi et de vouloir les faire lire à tout prix. Il faudra que je consulte… Je n’ai pas toujours un écrit qui correspond au thème demandé, et parfois je cale. Tout ce qui est soumission et pouvoir, par exemple, ne me convient pas trop. Je tourne l’histoire en relation amoureuse et me retrouve hors sujet.

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THÉO KOSMA – Quels thèmes de cette collection vous inspirent-ils le plus ? Si vous dirigiez cette collection, quels seraient les prochains thèmes ?

NOANN LYNE – Tant de choses ont déjà été écrites… Je pencherais peut-être pour la bisexualité, un thème qui me plaît et qui est souvent marginalisé. On préfère les relation gays ou lesbiennes. Pourtant il y a matière à réflexion. Ne sommes-nous tous pas un peu bi ? La masturbation, c’est l’amour avec soi-même, donc avec un être du même sexe…

THÉO KOSMA – Il me semble que selon vous, les récits très crus peuvent parfois rimer avec la dimension amoureuse. Quels peuvent être, à votre sens, les différences et les points communs entre ces deux univers, d’apparence si opposés ?

NOANN LYNE – Je ne pense pas que les deux soient forcément opposés. Certains couples vivent une sexualité débridée en étant très amoureux. D’un autre côté, il est possible d’avoir une sexualité intense avec quelqu’un sans éprouver de véritables sentiments. Tout cela est assez complexe. Je prendrais bien un joker…
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THÉO KOSMA – Certaines personnes, de tout âge (légal), vivent aujourd’hui une sexualité très libérée. Je dirais que vos écrits « prônent » (j’ignore si c’est bien le terme exact) le fait qu’une sexualité très libérée puisse valoriser le corps autant que l’esprit. Pourtant, à contrario, bien des hommes et femmes n’ayant pas eu assez de considération se réfugient dans le sexe à outrance. Qu’en pensez-vous ? Est-ce un paradoxe ?

NOANN LYNE – Je prône en effet dans mes écrits une sensualité libérée. L’écriture érotique appelle ce genre de prise de position je pense, ou alors il ne faut écrire que de la romance édulcorée, ce qui n’est pas mon genre, car comme disait Gide : “C’est avec les bonnes pensées qu’on fait de la mauvaise littérature.”

Nombre de personnes trouvent refuge dans une sexualité à outrance et débridée. Le sexe est une façon de se mettre en valeur, car il est valorisant d’être accepté, dorloté, caressé, aimé… Même si ceci reste purement physique. Nous avons besoin de contact, de toucher, d’enlacer, et besoin de personnes qui ont envie de nous. C’est pourquoi, je pense, certains trouvent dans le sexe une sorte de réconfort. Les clubs libertins sont remplis de gens qui veulent se prouver quelque chose, qui sont en recherche non seulement de bien-être mais aussi d’estime, d’un regard positif des autres, fût-ce dans la débauche.

En réalité, le nirvana ne réside pas dans l’acte lui-même, mais dans l’union conjuguée des corps et des esprits.

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THÉO KOSMA – Je distingue un côté sombre dans votre plume. Estimez-vous que ce soit le cas ? Si oui, d’où vient donc ce côté obscur ?

NOANN LYNE – Peut-être est-ce le résultat de ma sensibilité… Je vois le monde comme une entité tragique (dont je m’échappe dès que je le peux, par la pensée). Il laisse des traces cependant. On ne sort pas indemne d’un monde aussi violent, à moins d’être violent soi-même.

THÉO KOSMA – Vos idées vous viennent-elles de façon un peu « magique », comme tombées du ciel, ou bien vous inspirez-vous de ce que vous voyez/vivez au quotidien ?

NOANN LYNE – Je ne crois pas que j’invente beaucoup, d’ailleurs je n’ai aucun don pour la fiction. Je m’inspire donc de ce que j’ai vécu, vu et entendu… Je traficote cela dit, une histoire d’amour avortée autrefois devient, par la force des mots, une belle aventure croustillante. C’est ce qui est gai dans l’écriture, érotique en particulier, cette possibilité de pouvoir travestir et réinventer.

Pour en savoir plus sur l’auteure, visitez son site : http://www.noann.fr/

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