Entretien avec Eric Orlov – Partie 1

Les entretiens d’auteurs sont de retour ! Je les avais cessés avec regret par manque de temps. La solution trouvée : envoyer deux questionnaires, préparés d’avance, à tous les écrivains ou blogueurs qui le souhaitent, et sont dans le thème de Plume Interdite bien entendu. Bien des échanges sont donc à venir… Parfois certaines questions seront personnalisées, mais la plupart du temps les questions seront les mêmes. C’était la seule possibilité pour poursuivre cette série d’interviews dont j’ai eu d’excellents retours.

Pour inaugurer cette nouvelle salve de discussions enrichissantes, j’ai le plaisir de diffuser les réponses d’Eric Orlov, ou Eric Céloin sur Facebook. https://www.facebook.com/eric.cestmoi.1 .  Eric nous fait l’honneur de répondre aux deux questionnaires : l’un sur la littérature et sa plume, l’autre sur l’érotisme en général. Première partie ci-dessous…

 

Ta façon d’écrire et de vivre la littérature…

. Qu’est-ce qui crée l’étincelle d’une histoire ? Qu’est-ce qui la déclenche ?

Les raisons pour lesquelles on est amené à faire l’amour. Pour moi, le véritable érotisme tient bien moins dans le passage à l’action que pendant ce moment durant lequel l’on bascule, l’on désire.
Je trouve que cela est bien trop manquant dans la littérature, et pire encore, dans le cinéma.

. Quelles sont tes techniques pour « affronter » une nouvelle ou un roman, le poursuivre coûte que coûte et en venir à bout ?

J’écris tous les jours. La régularité, le travail, le fait de ne pas abandonner face à la difficulté.

. Qu’est-ce qui fonctionne le mieux… écrire dans la joie et l’apaisement, ou plutôt dans la pression et la souffrance ?

J’avoue que les affects tristes m’ont donnés plus souvent « des ailes » par le passé. J’apprends aussi à écrire maintenant pendant la joie, mais c’est moins évident.

. Ecrire est un plaisir demandant des contraintes. Comment trouver le juste milieu entre contrainte et plaisir ?

En faisant, en allant au bout du projet, en le corrigeant pour en faire un « objet parfait » au moins à ses propres yeux.

. As-tu tes propres tabous en matière d’écriture ? T’arrives-t-il de te censurer ?

Je n’ai aucun tabou, je ne me censure pas. Pourtant, il est énormément de pratiques qui me déplaisent, de fait, je ne les écris pas.

. De quoi t’inspires-tu pour écrire ? Simplement l’imaginaire, ou bien ta vie, celles des autres, les médias ?

De tout ça oui, j’essaie de faire feu de tous bois.

. On dit parfois que tout roman a un côté autobiographique. Ecrit-on pour exorciser un certain vécu, ou au contraire pour aller au-delà de soi ?

Les deux en ce qui me concerne.

. As-tu une idée du visage de ton lectorat ?

Oui, très majoritairement des femmes, de 25 à 60 ans.

. Est-il simple d’accorder cette vie forcément un peu sulfureuse avec une vie plus classique de famille ? Caches-tu cette activité littéraire à certains ?

Non, plus maintenant. J’assume. Même si bien entendu je ne fais pas lire mes textes à ma fille de 14 ans.

 

Ton parcours, ton futur…

. Soudain, ton dernier livre se vend à 10 millions d’exemplaires… indescriptible joie ou énorme angoisse ?

Les deux ! Fatigue à l’avance d’avoir à démonter le mythe de l’écrivain, du talent, de celui qui a fait. Mais aussi joie du partage, de toucher, d’émouvoir.

. Sur quoi travailles-tu actuellement ? Quelle sera ta prochaine sortie ?

Un roman assez dur sur la condition sociale de certains, sur le culte de la performance, sur notre aveuglement coupable.

. Pourquoi avoir choisi cette voie ? Qu’est-ce qui t’y a mené ?

Je suis passionné par le thème de l’entreprise et de ses rapports sociaux intrinsèques. Passionné par le torrent de mensonges qu’on y profère, par la servitude volontaire.

. Es-tu auteur professionnel, si oui est-ce un métier difficile ? Ou bien es-tu plutôt amateur ou semi-pro ? (En ce cas : ta principale activité est-elle secrète?)

Semi-pro, même si j’ai déjà publié trois fois dans de grosses maisons.

. Cet univers littéraire exige-t-il un pseudonyme, ou doit-on assumer ses écrits quitte à dévoiler son identité réelle ?

C’est à chacun d’en décider  Cela peut revêtir un sens politique de déclarer sa vraie identité, mais cela ne doit pas être une obligation.

. Si tu pouvais étendre ta création favorite sur un autre support, que choisirais-tu? B.D., peinture, cinéma, téléfilm, série télé, histoire audio ?

Cinéma ! Le plus complet des arts.

 

La littérature érotique en général…

. Ce domaine souffre de deux idées reçues. On l’accuse : 1 – d’avoir un style pauvre et un vocabulaire répétitif pour des histoires très clichés 2 – d’être des livres uniquement faits pour exciter. Ces on-dits sont-ils injustifiés ? Justifiés en partie ?

Totalement et quasiment systématiquement justifiés. C’est affligeant.

. En quoi ces lectures peuvent-elles nous faire réfléchir ? Nous ouvrir au monde, aux autres ?

Elles le pourraient si elles se donnaient la peine d’une véritable réflexion philosophique sur ce que sont les êtres.

. Livre érotique : simple amusement ou bien outil de développement personnel ? Pourquoi ?

Ecrire m’a ouvert un peu à l’acceptation de l’autre, à l’acceptation de qui il est.

Ta vision personnelle de la littérature…

. Quels sont tes coups de coeur littéraires, que ce soit en érotique ou tout autre style ?

Une journée d’Ivan Denissovitch. Le désert des tartares. Ulysse. Tout Sarraute, Tout Duras, Tout Sagan. Et en incroyablement érotique : les liaisons dangereuses.

. Dans un polar ou un livre d’horreur, on peut prendre plaisir à imaginer des choses que l’on n’aimerait pourtant jamais vivre. Est-ce également le cas en littérature érotique ? Quel est ce mystère ?

Pas en ce qui me concerne, je m’identifie trop. De fait, je déteste le genre « horreur »

. Qu’aimes-tu lire en général et pourquoi ?

Je ne lis quasiment plus rien depuis quelques années, afin de trouver ma propre musique.

 

Littérature érotique et société…

. A une époque, bien des ados et même préados ont découvert l’érotisme via les pages de sexe cru de « S.A.S. ». Ces lectures peuvent-elles jouer sur l’éveil sexuel, avoir un aspect pédagogique ? Ou bien doit-on laisser cela impérativement aux plus de dix-huit ans ?

Non. S.A.S c’est tout mignon, et c’est cool d’être éveillé à cela quand on est ado 

. Quelle est la limite dans la littérature érotique ? Faut-il des tabous et des interdits, si oui lesquels ?

Une limite d’âge. A partir d’un certain âge, chacun a le droit d’accéder à ce qui lui plaît.

. En quoi cette littérature résonne-t-elle avec la société actuelle, à l’heure entre autre d’un certain retour à l’obscurantisme religieux ?

Elle pourrait avoir un rôle politique, sociétal, lever le voile sur certains obscurantismes. C’est bien trop rarement le cas.

. De quelle façon le monde d’aujourd’hui influence-t-il ton écriture ?

Sa brutalité, son absurdité, son obsession pour la vitesse m’interrogent chaque jour.

 

Ta création dans son ensemble…

. Que ressens-tu par rapport à tes personnages ? Te ressemblent-ils, te sont-ils opposés ? Sont-ils des amis ?

Les femmes que j’écris sont extrêmement libres (au sens philosophique du terme, elles se »connaissent ») Souvent les hommes sont inaboutis, un peu immatures. Quand je glisse entre les lignes un personnage qui pourrait me ressembler, il est doux, jamais pressé, et impérieusement mû par la joie de faire jouir sa / ses partenaires.

. Aimerais-tu coucher avec eux, ou certains d’entre-eux ?

Carrément  Les femmes que j’écris sont assez idéales 

. Injectes-tu de l’amour dans tes histoires ? Peut-on écrire du sexe sans un gramme d’amour ?

Tout le temps ou presque, à vrai dire c’est la jonction du sentiment amoureux et du sexe qui m’intéresse, et me fait bander.

. Ecris-tu en fonction de ce que le lecteur pourrait aimer, ou bien as-tu l’écriture plus intuitive ?

Non, je suis totalement et volontairement « personnel ». On me le renvoie d’ailleurs très souvent.

. Comment fais-tu pour mieux vendre, te faire connaître, fidéliser le lecteur ?

J’écris très régulièrement des textes distribués gratuitement sur la toile depuis 2002.

. Si ton œuvre totale pouvait se résumer en un message, quel serait-il ?

Soyez doux avec vous-même, doux avec les autres.

Son Linkedin : https://fr.linkedin.com/in/eric-orlov-0bb86295

Son livre : https://livre.fnac.com/a11539688/Eric-Orlov-Engrenage

Une chronique de son travail : https://kroniques.com/2018/03/13/engrenage-eric-orlov/

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