Cinq sens
— Parfois je suis d’accord avec les garçons qui considèrent un peu les filles comme des salopes.
— Ou bien qui les déconsidèrent ? Et c’est qui au juste les salopes. Toi et moi ? Les autres ? Tout le monde ?
— Tout dépend. Une fois que le désir s’installe on pense trop au sexe. Je veux dire au sexe en lui-même ! On est pas assez concentrées sur les cinq sens nous les filles !
— Et eux ?
— Eux non plus. Ils nous aident pas, on les aide pas ! Mais… nous, les jolies jeunes filles, les bonnes, les objets de convoitise, les trophées, nous avons la main. Entre maintenant et nos trente ans, minimum,
à condition de prendre soin de soi, on peut décider avec qui on couche,
quand, où, combien d’hommes… On peut décider de tout ! Tandis qu’eux doivent se contenter de… ce qu’ils parviennent à décrocher.
— Donc c’est plus à nous de les éduquer ?
— Plutôt oui.
— Et comment ?
— Je te dis, en ciblant les cinq sens.
— Au lit ? Soit donc… Le toucher, les caresses, la pénétration. L’ouïe, ses souffles et gémissements, et les nôtres. Le goût… d’une bite, et du sperme. L’odorat… soit les parfums du corps. La vue, en refusant de rester dans le noir, en prenant le temps de regarder. C’est ça ?
— Oui mais c’est trop limité. Nos cinq sens on doit les utiliser dès le début de la relation.
— Parce que toi t’avales le sperme dès le premier quart d’heure de la rencontre ?
— Enfin ! Je te parle du goût du moment. Si tu fais attention, si y a une vraie connexion avec la personne face à toi, tu peux ressentir comme un goût dans la bouche et la gorge pendant la première discussion. Puis, prendre le temps de savourer le verre, ou la pâtisserie, le resto… Vient ensuite le goût de sa langue, de sa bouche, sa salive… Et enfin seulement le goût de sa peau, de son sexe et de son sperme. Tu vois ?
— Et idem pour le reste ?
— Bien entendu ! Le son de sa voix, puis quand ça commence à devenir plus intime les chuchotements à l’oreille… Tout ça quoi. Et puis la vue d’un coucher de soleil, de son regard… etcétéra. Autrement dit : se faire enculer à quatre pattes en se faisant tirer les cheveux, d’accord. Mais en mode cinq sens, et dans la finalité d’une rencontre. Et aussi et surtout, que ces cinq sens soient ressentis dès le début. Sinon tout le reste y perd ! C’est comme ça qu’on se sent vraiment vivante.
— Quoi qu’il arrive ils finissent par nous traiter de salopes. Ou à nous voir comme telles.
— Oui mais… y a salope et salope.
La joueuse et les joueurs
— Alors ces vacances ?
— Tu te souviens ? Je fais partie d’une asso de jeux de plateau et de réflexion. Elle organisait un séjour dans un camping au bord d’un lac, dans le sud. Huit jours de jeux ininterrompus. Huit ! Et tu vas rire ! J’étais tellement dedans qu’il y avait plus rien d’autre dans mon esprit.
— Plus rien d’autre tu veux dire, pas même de garçons ?
— Aucun !
— Il ne devait pas y en avoir aucun au camping… Pas aucun beau mec tout de même.
— Et qui plus est, dans les assos de jeux il y a près de neuf mecs pour une fille.
— Ouch ! De quoi faire de sacrés gang bangs.
— Théoriquement. TRES théoriquement. La plupart des membres sont aussi bons joueurs que vilains garçons. Coïncidence ?
Bon, j’exagère ! Disons, pas des mecs super sexys, loin de là.
— Eux je pense aimeraient moins de théorie et plus de pratique avec toi.
— Même pas certain ! On trouve plus de pères de familles ou de célibataires endurcis que de dragueurs. C’est pas plus mal, tout le monde est content.
— Donc tu sais quand même des choses sur eux.
— C’est surtout que je les connaissais d’avant ! Mais des mecs du camping, n’étant pas de l’asso, sont venus se greffer à nos activités. Pour l’amour du jeu ? Ou par esprit de séduction envers moi, et les quelques filles présentes ? Je saurais pas dire. Toujours est-il que les concernant,
j’aurais pu être face à une tribu d’Apollon ou un troupeau d’Elephant-Man,
impossible d’y voir une différence. Tout ce que je voulais c’était affiner mes stratégies, calculer, défier les meilleurs, apprendre de nouvelles techniques, m’améliorer à tous mes jeux favoris.
— Tu n’as eu aucun regret alors.
— Si, après coup. Quand j’ai vu l’Instagram de l’asso, une semaine plus tard. Avec toutes les photos prises au cours du séjour. Je n’étais désormais plus en mode jeux, et de nouveau en mode mecs. Nouveau regard ! Sortie de la matrice !
— …Pour aller dans une autre matrice.
— Forcément. Et là j’ai vu à quel point tout le monde était court vêtu, parfois presque sans fringues, et à quel point il y avait de beaux garçons ! Avec des photos trop excitantes, du genre où j’étais en petite robe à côté de trois mecs musclés torses-nus, et plein d’autres configurations dans le genre.
— Est-ce que tout le monde a été comme toi ?
— La copine venue avec moi disparaissait souvent entre les parties… je pense qu’elle a pas mal baisé.
Et a récupéré aussi ceux qui avaient envie de moi.
— Filles en sous-nombre et toi qui remarque même pas les mecs, elle a eu une sacrée demande à gérer !
— Et je suis même pas certaine qu’elle ait fait du tri. A bien me rappeler, je me demande aussi s’ils ont pas intégré ça aux jeux. Des défis… Je perds, je te suce, tu perds tu me fais un cunni, celui qui gagne parmi vous trois peut me baiser… dans ce style.
— Avec le recul t’aurais aimé faire comme elle ?
— Oui et non. Ses performances aux jeux ont été bien moins bonnes que les miennes. Avant je pensais que les championnes étaient super épanouies sexuellement pour jouer aussi bien. Désormais je doute…
— Tu aurais amélioré ton jeu grâce au manque de sexe ? Je ne crois pas. Je dirais plutôt que sur toute l’année, ta vie sexuelle est si satisfaisante que tu peux zapper complètement ça le temps d’un séjour.
— Prochain séjour je me force à baiser au moins une fois chaque soir : on verra quelle théorie l’emporte.
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