Troisième partie de l’entretien avec le poète Cyr…
« Le jour de mes 12 ans, j’ai eu comme cadeau d’anniversaire une encyclopédie sur la sexualité censée m’expliquer, notamment, comme j’avais été conçu (et pas que l’histoire bêtement scientifique et hasardeuse de la rencontre du spermatozoïde avec l’ovule) »
. Sur quoi travailles-tu actuellement ? Quelle sera ta prochaine sortie ?
Ma production actuelle est la continuité de mon travail de mise en recueil du millier de poèmes pour A. que j’ai écrit fiévreusement entre 2014 et 2015. 3 recueils ont déjà vu le jour depuis (1 par an) sur une dizaine de prévus, je n’en donne pour l’instant à lire que des extraits que je mets à jour progressivement sur mon site http://www.poesie-erotique.net/index.php/desirs/poemes-pour-a. J’ai fait quelques envois de recueils complets à des éditeurs, mais je me concentre surtout sur le travail d’écriture (dont un roman commencé depuis peu), le contexte n’étant pas favorable pour l’édition. J’ai un autre projet en parallèle à mener à court-moyen terme : remettre mon site au goût du jour (j’y proposerai peut-être des version électroniques gratuites des recueils terminés). Sinon pour la suite, j’ai mes poèmes de jeunesse et ceux écrits depuis l’inauguration de mon site Internet en 2004 dont je voudrais produire une sélection retravaillée en recueils.
. Pourquoi avoir choisi cette voie ? Qu’est-ce qui t’y a mené ?
Je n’ai pas l’impression d’avoir choisi, mais bien d’avoir été mené dans cette voie de l’écriture et plus particulièrement de la poésie érotique, par un contexte particulier : des parents instituteurs (lecture et écriture au programme) et qui avec 1968 on franchit un pas générationnel sur la question du sexe (le sujet n’était plus tabou, il devenait lui aussi au programme). Ainsi, le jour de mes 12 ans, j’ai eu comme cadeau d’anniversaire une encyclopédie sur la sexualité censée m’expliquer, notamment, comme j’avais été conçu (et pas que l’histoire bêtement scientifique et hasardeuse de la rencontre du spermatozoïde avec l’ovule). Les 5 volumes de cette encyclopédie se déclinaient selon un niveau de lecture allant de l’enfance à l’âge adulte. J’ai passé mon temps à en effeuiller les pages de-ci–de-là, sans tenir compte de la progression par âge…
Vers 15 ans, Baudelaire m’a chatouillé les oreilles à la lecture des « Fleurs du mal » et en particulier les pièces interdites. Mais c’est une autre découverte dans la bibliothèque familiale qui fut l’ouvrage déclencheur : les nouvelles d’Anaïs Nin réunies sous le titre « Vénus érotica ». J’ai notamment été subjugué par la façon poétique dont elle pouvait aborder des thèmes provocateurs (violence, inceste…), j’ai dévoré plusieurs fois ce livre, ainsi que tâché quelques pages… C’est aussi l’époque à laquelle j’ai prêté plus attentivement l’oreille aux paroles chantées par Serge Gainsbourg sur le disque vinyle que mes parents passait depuis 1979. En âge de mieux comprendre ce qui arrivait à Lola Rastaquouère et Marilou, j’explorai plus loin son univers qui acheva de me convaincre que si je n’avais pas appris à jouer et chanter, je pouvais certainement m’amuser à écrire de l’érotisme en poésie.
« La création n’ayant pas de limites, tout est possible à mélanger, expérimenter »
. Es-tu auteur professionnel, si oui est-ce un métier difficile ? Ou bien es-tu plutôt amateur ou semi-pro ? (En ce cas : ta principale activité est-elle secrète?)
Qui peut aujourd’hui être pro, ne vivre que de cette activité ? Je me considère comme amateur et je ne trouve le temps disponible pour écrire et composer mes recueils que pendant les congés payés (merci au monde ouvrier de 1936). Les personnes qui se proclament auteurs simplement parce qu’ils sont « édités » sur une plate-forme en ligne (le plus souvent tenue directement par un diffuseur ou un imprimeur, et non par un véritable éditeur) se mettent le doigt dans l’oeil.
. Cet univers littéraire exige-t-il un pseudonyme, ou doit-on assumer ses écrits quitte à dévoiler son identité réelle ?
Chacun est libre de faire comme il veut, c’est la littérature qu’on doit « juger », pas l’auteur. « Cyr » vient de mon prénom, les 3 premières lettres, sachant que j’ai hésité au début avec un anagramme : « Lyric ».
« Cyr » est un bon choix je trouve comme pseudo pour le genre que j’écris et pour m’y mettre en scène (et non me cacher). Par ailleurs mon patronyme n’a rien d’érotique, sinon un éventuel lien avec le sommeil… je laisse le mystère… car même si j’écris à partir de mes propres expériences, « Cyr » est un personnage en tant que tel. Le pseudo est aussi une relation intéressante avec le lecteur, il peut plus facilement s’identifier, se mettre dans ma peau ou celle de mes partenaires de jeu 😉
« Je trouve aussi que la littérature érotique peut être souvent répétitive et ennuyeuse »
. Si tu pouvais étendre ta création favorite sur un autre support, que choisirais-tu ? B.D., peinture, cinéma, téléfilm, série télé, histoire audio ?
La création n’ayant pas de limites, tout est possible à mélanger, expérimenter… Je déclinerai volontiers un ouvrage illustré en BD car j’apprécie beaucoup cet univers artistique. L’audio j’y songe aussi, j’ai fait de la radio amateur et ma voix passait bien. Enfin, un de mes poèmes sert de support audio à un court métrage expérimental diffusé l’an denier dans divers festivals de cinéma : http://www.poesie-erotique.net/index.php/desirs/balades-erotiques-et-pornographiques/15-texte/poesie/1000-orgie. La vidéo, une archive familiale en Super 8, montre une équipe de rameurs basques qui s’entraînent en pleine mer, la caméra danse avec les vagues, les bras musclés, les torses luisants sous l’effort et le soleil… Mon texte est dicté, rythmé en fond sonore, le résultat est surréaliste et m’a enthousiasmé.
. Ce domaine souffre de deux idées reçues. On l’accuse : 1 – d’avoir un style pauvre et un vocabulaire répétitif pour des histoires très clichés 2 – d’être des livres uniquement faits pour exciter. Ces on-dits sont-ils injustifiés ? Justifiés en partie ?
1 Je trouve aussi que la littérature érotique peut être souvent répétitive et ennuyeuse. Il y a aussi des choses de qualité bien sûr, mais elles ne sont pas toujours mise en valeur sur le « marché », restant confiné aux petits éditeur indépendants. Ce sont les choix des diffuseurs qui justifient malheureusement cette réalité. Il y a une tendance médiatique à la standardisation, s’accompagnant de buzz éphémères censés réveiller notre appétit de consommer, qui n’épargne pas le domaine de la littérature érotique.
2 Pas uniquement, mais exciter est quand même l’objectif quand on parle d’érotisme. D’autre part la littérature a sans doute pour fonction d’exciter au moins l’esprit du lecteur.
À suivre…
Retrouvez Cyr sur son site : http://www.poesie-erotique.net/