Entretien avec Lionel Parrini, partie 2

Suite et fin de notre entretien avec l’auteur Lionel Parrini

 

. Livre érotique : simple amusement ou bien outil de développement personnel ? Pourquoi ?

Les deux, encore une fois, ça dépend des livres. Ce qui est certain c’est que depuis que la littérature érotique foisonne de moins en moins de personnes se cachent pour en lire. Ça c’est un très bon signe mais est-ce que ça veut dire qu’on baise plus ? Lol , Ça en revanche…. Je laisse ça aux «  experts »:-)

 

Votre vision personnelle de la littérature…

. Quels sont vos coups de coeurs littéraires, que ce soit en érotique ou tout autre style ?

Anne bert, Alina Reyes, Oscar wilde, Christian Gailly, Harold pinter, Herman hesse. Ces auteurs me touchent particulièrement.

. Dans un polar ou un livre d’horreur, on peut prendre plaisir à imaginer des choses que l’on n’aimerait pourtant jamais vivre. Est-ce également le cas en littérature érotique ? Quel est ce mystère ?

Ah oui, bien sûr mais je ne connais pas la clé de ce mystère. Il y a certains fantasmes que je ne voudrais pour rien au monde réaliser ! ( rire)

. Qu’aimez-vous lire en général et pourquoi ?

Vraiment, je suis un curieux et j’aime diversifier mes lectures : théâtre, poésie, romans. Mais j’ai une préférence pour les textes où l’écriture est aussi un jeu pour le lecteur, un acteur à part entière, une matière vivante et pas juste un moyen de raconter une histoire. J’aime donc quand la langue a autant d’importance que l’histoire ( Chistian ostler / Jean Echenoz / Jean-Philippe Toussaint ).

 

Littérature érotique et société…

. A une époque, bien des ados et même préados ont découvert l’érotisme via les pages de sexe cru de « S.A.S. ». Ces lectures peuvent-elles jouer sur l’éveil sexuel, avoir un aspect pédagogique ? Ou bien doit-on laisser cela impérativement aux plus de dix-huit ans ?

Elles peuvent participer à l’éveil sexuel mais je pense que nos jeunes s’éveilleront autrement : avec snapchat par exemple !

. Quelle est la limite dans la littérature érotique ? Faut-il des tabous et des interdits, si oui lesquels ?

Je crois que la limite c’est la mauvaise foi, l’insincérité, la violence pour la violence. Écrire pour produire juste de l’effet, de la sensation, c’est vraiment d’une tristesse inouïe. Un auteur devrait prendre soin de son livre comme d’un enfant : ne pas en faire juste un produit, offrir un morceau de soi, d’intime, de vulnérabilité, de questions. Donner à voir une vision. Sinon comment peut-on être touché ?

. En quoi cette littérature résonne-t-elle avec la société actuelle, à l’heure entre autre d’un certain retour à l’obscurantisme religieux ?

Elle est de fait militante pour une liberté de vivre une vie de plaisirs sans entrave avec consentement, respect, tolérance. C’est important de continuer à écrire sur le corps, le désir, le plaisir, et entre les cases : pour se battre contre toute dictature. Il n’y a pas de règles que des formules à inventer en fonction de chacun. Ayons l’audace de composer plutôt que d’imiter. Le plaisir mérite qu’on le dédiabolise encore et toujours. Et le plaisir peut-être simplement dans l’œil qui contemple une rivière.

. De quelle façon le monde d’aujourd’hui influence-t-il votre écriture ?

Je n’ai pas toujours conscience de ce qui me bouleverse directement ou indirectement ( protection) mais je finis toujours par m’en rendre compte surtout en écrivant. Ce qui m’effraie le plus, c’est cette course à l’individualité, le culte des œillères. Je crois que ce qui m’influence c’est tous ceux qui se battent pour continuer à réalise leur(s) rêves(s) tout en intégrant dans leur travail une démarche pacifiste, désintéressé, à l’écart d’un système qui encourage à devenir un homme-produit. La marginalisation assumée, discrète, finalement délicate, me touche, me booste. De plus en plus de femmes et d’hommes se lancent dans une vie qui fait sens avec ce qu’ils sont et ça c’est une bonne nouvelle qui me donne de l’espoir.

 

Votre création dans son ensemble…

. Que ressentez-vous par rapport à vos personnages ? Vous ressemblent-ils, vous sont-ils opposés ? Sont-ils des amis ?

Ils sont toujours des étrangers que j’apprends à connaître et deviennent des bougies pour moi, dans mon intériorité. Ça finit toujours par devenir des alliés.

. Aimeriez-vous coucher avec eux, ou certains d’entre-eux ?

Non, je n’oublie pas qu’ils sont fiction.

. Injectez-vous de l’amour dans vos histoires ? Peut-on écrire du sexe sans un gramme d’amour ?

Je ne suis pas capable d’écrire sans amour.

. Ecrivez-vous en fonction de ce que le lecteur pourrait aimer, ou bien avez-vous l’écriture plus intuitive ?

L’intuition est ma boussole, je ne réponds pas à ce qui pourrait plaire mais à ce qui me questionne.

. Comment faites-vous pour mieux vendre, vous faire connaître, fidéliser le lecteur ?

Seulement le bouche à oreille et l’avantage du théâtre, les comédiens et les spectateurs le font pour vous.

. Si votre œuvre totale pouvait se résumer en un message, quel serait-il ?

Refusez toute étiquette vous concernant, la vie est mouvement, allez toujours là où vous êtes bien même si ça gêne la morale. Respectez simplement le consentement. L’être libre n’a pas ou trop d’étiquettes pour qu’on réussisse à le définir. Refusez toutes sortes d’emprises.

. Ecrire peut-il vous provoquer une excitation sexuelle ? Et lire ? Rêver ? Imaginer ?

Oui, bien sûr, et la liste de s’arrête pas à ces actions ! D’une façon plus générale, je dirai que tout ce qui nous permet de nous sentir bien crée la disponibilité en nous et donc le potentiel pour être ému, excité. Je crois aussi que nous devons cultiver la porosité : cet état où on s’autorise à laisser passer les émotions, les contradictions, les envies avec un regard curieux, amusé, bienveillant. Être éponge, c’est apprendre à mieux se comprendre et mieux comprendre les autres.

 

Merci beaucoup à Lionel d’avoir répondu à toutes ces épineuses questions… à présent, je vous invite à visiter son site sans tarder

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