Le cul avant ou après le repas ?

Quelques épisodes de « Dialogues Interdits », collection de petites histoires complètes uniquement constituées de dialogues…

 

Avant ou après ?

 

— A quoi tu penses depuis tout à l’heure ? Tu m’as l’air songeuse…

— Je me demandais ce que je préférais avec un mec. Le cul avant le resto, ou le resto avant le cul…

— Il y a aussi le cul tout court. Ou le resto pour le resto.

— Pour qu’il y ait concept, y faut qu’il y ait combinaison ! Sinon ça fonctionne pas.

— Concept ou pas, je suis partisane du cul pour le cul.

— Même l’estomac vide ?

— Je suis plus une folle de plaisir qu’une dingue de bouffe. Puis avec un homme y a toujours moyen de se remplir un peu l’estomac…

— En quantités minuscules ! Sauf en cas d’énorme orgie.

— Tu tiens au resto, toi ?

— Oui, je suis une classique. Au moins sur ce point.

— Avant ou après ?

— Pourquoi pas les deux ?

— Pourquoi pas pendant alors ? A tout prendre, le cul avant, tu manges ensuite plus détendue. Plus besoin pour lui de sortir le grand jeu.

— Avec le risque qu’il t’invite plus à dîner. Après tout s’il a déjà obtenu ce qu’il voulait…

— Pourquoi toujours le dîner ? Après le cul il peut aussi y avoir un déjeuner, ou un petit-déjeuner, ou un coup à boire. T’oublies que ça peut arriver n’importe quand.

— Tant mieux pour les radins ! Un café coûte moins cher qu’un entrée-plat-dessert.

— Si c’est le matin je veux au moins croissants et tartoches.

— Un Mac Morning ?

— A la rigueur. Pour peu qu’il aille le chercher et te l’amène au lit.

— Demande pas ça à une aventure d’un soir ! Il est capable de partir… pour plus revenir.

— Si au moins il l’achetait et le déposait devant la porte ça resterait pardonnable.

— Remarque, on a qu’à pas faire autant nos princesses et être capables de partager la note, voire d’inviter nous-mêmes. On est trop ringardes. Me concernant, ce sont bien plus souvent des invitations à dîner qu’un dèj’ ou petit-dèj’.

— Moi j’adore les petits-dèj’. Quand je passe la nuit chez un mec et que le matin il m’a préparé tartines et café, rien que pour moi, je craque ! Tu vois ? Pas besoin d’un resto de luxe, je suis pas difficile. L’espace de quelques instants, j’ai l’impression d’être une mère de famille, et j’attends presque qu’un ou deux bambins sortent de leur chambre et me sautent dans les bras.

— Le café, le repas ou je sais pas quoi… est une sorte de récompense ?

— Plus ou moins. Après l’effort le réconfort. Enfin, le cul c’est les deux en même temps : effort et réconfort. Alors ce serait plutôt après le réconfort le réconfort. Un rapport gagnant-gagnant.

— Un terme de bizness !

— Les bons bizness men et bizness women organisent leur vie sexuelle pour qu’elle leur donne énergie et inspiration.

— Et si y a repas après, plus le sexe était bon plus le repas est de luxe ?

— Y a des mecs qui restent radins même si tu les mènes au septième ciel. D’autres très généreux quoi qu’il arrive. Je me prépare toujours un bon petit plat glissé dans un Tupperware. On sait jamais.

— Le resto avant, par contre, le mec cherche à faire bonne impression. Il sait que tu lui feras pas tout le Kamasutra pour un simple menu à huit cinquante dans un japonais.

— C’est vrai que si c’est le repas avant le cul, même les radins ont tendance à se fendre de quelques efforts. Par strict intérêt personnel en vrai.

— Oui mais du coup, celui qui t’offre un resto de luxe va penser que tu vas forcément faire des trucs de ouf.

— Mais JE fais des trucs de ouf. Quel que soit le prix du repas. Seulement, comme il ignore que ça ne dépend pas du prix, il fait chauffer la carte bleue… pour une jolie carte de resto ! Et une plus jolie note encore. Pour me mettre, question note, un dix sur dix après coup. Si ! Mmmm… Finalement peut-être que la combinaison resto plus cul seulement après c’est mieux. Tout compte fait tu as raison !

 


 

Langage sale, interrogation

 

— J’ai été romantique toute la nuit.

— Même pour la baiser ?

— Même. Tout love, tout doux, tout gentil.

— Même dans les mots ?

— Surtout dans les mots. Et quelques jours plus tard elle m’apprend qu’elle aurait voulu que je sois plus trash. Alors qu’avec celle d’avant, j’ai eu le malheur de la traiter de petite salope pendant l’acte et elle m’a ordonné de me retirer tout de suite pour se barrer !

— Que la vie est mal faite…

— Comment savoir ? Si je leur demande je vais passer pour un neuneu. Elles me répondront que je casse la magie.

— Ce qu’il faut que tu développes, c’est ton intuition… et ton sens de l’observation. T’as jamais regardé bien au fond des yeux d’une fille ? Si si, tout au fond un peu à droite.

— …Et plus prosaïquement ?

— Commence par une attitude un peu crue, ou au contraire un peu douce, plonge tes yeux dans les siens à t’en noyer, et là tu verras une petite pancarte qui s’agite : « Vas-y tu peux » ou « Je préfère pas ».

— Ah okayyy ! Donc les poésies d’amour où on parle du fond des yeux et du regard, en fait c’est pour évoquer le cul !

— Et je dirais même plus : c’est pour évoquer le fond de la chatte, de la gorge, de l’anus ! C’est le principe même de la poésie : allégorie, détournement… Comme le romantisme. C’est une forme d’hypocrisie par le biais de la littérature.

 


 

Troublant marché

 

— François mon ami, faut que t’apprennes à mieux choisir tes légumes au marché. Remets ces tomates, la salade que tu vas faire avec sera dégueulasse.

— Okay. Choisis pour moi alors.

— Tu connais pas le dicton ? « Pêche pour un homme il mangera un jour, apprends-le à pêcher… »

— « …il mangera toute sa vie ».

— Joue-le plus sexuel. Passe doucement tes mains sur les tomates en fermant les yeux, et empoigne-les comme si tu tenais des nichons. Il faut qu’il y ait un petit côté moelleux, et une fermeté… sans que ce soit trop dur non plus comme des seins refaits.

— Okay, alors je dirais… celle-ci… celle-ci et puis celle-là.

— Et voilà ! Un peu d’imagination et tu fais de bien meilleurs choix.

— Ça fonctionne idem pour tous les fruits et légumes ?

— Un pamplemousse doit avoir la fermeté d’un ventre. Une endive, le lissage d’une peau. Pour les figues, la douceur d’une couille. Et pour les courgettes, tiens justement en voilà, tu les tâtes en pensant à des bites.

— Là je pourrais pas. Sauf si je pense à la mienne à la rigueur.

— Tente, c’est tout simple ! Tu cherches de la grosse bite bien longue et dure, avec un petit côté tendre qui fait envie.

— …Tu commences à me mettre mal à l’aise. T’en connais un rayon sur les bites longues et dures toi ?

— Rassure-toi monsieur l’homophobe. Je suis bi que le temps du marché. Dès que mon panier est rempli je redeviens cent pour cent hétéro.


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